Nous avons eu le plaisir de recevoir Pierre-Antoine Donnet pour un débat sur le thème de l’opposition sino-américaine. Cet échange a été organisé en partenariat avec le DEMEOC (diplôme d’établissement sur le Monde Extrême-Oriental Contemporain) de Sciences Po Lyon dont le professeur référent est Stéphane Corcuff. M. Donnet est ancien rédacteur en chef central de l'AFP et correspondant à Pékin pendant plusieurs années. Dans son dernier livre : Le leadership mondial en question, l’affrontement entre la Chine et les États-Unis (2020), il analyse les antagonismes entre les cultures confucéennes et occidentales et entre les stratégies de Pékin et de Washington : deux pays irréconciliables qui luttent pour le leadership mondial.
Modèle politique radicalement incompatible avec l’humanisme
Les deux intervenants ont pris la parole avec comme postulat de départ que la Chine est un objet encore infiniment mal connu en Occident. Elle invente un modèle politique radicalement incompatible avec l’humanisme. Selon eux, un Etat nation qui prétend à une stature globale ne peut y arriver s’il n’a pas un minimum de réussite sur le marché des valeurs.
En 1978, la Chine émerge dans un monde écrit par d’autres. Dès cette époque, entre la Chine et l’Occident il y a une grande erreur. L’Occident pensait que la Chine allait ouvrir ses idées, les Etats-Unis l’ont aidé à rentrer dans le commerce international notamment avec son entrée à l’OMC en 2001. Par la suite, la Chine n'a pas joué le jeu ouvrant une période de défiance.
"Aujourd’hui on a un dirigeant qui tente une « re-totalitarisation » du régime, c’est la première fois de l’histoire."
Le réveil aux Etats-Unis date d’Obama qui commence à comprendre que le serpent allait les piquer.
Aujourd’hui il y a un « risque de guerre », Pierre-Antoine Donnet n’hésite pas à employer ce terme. Il se demande si le conflit ne naîtra d’ailleurs pas autour de Taïwan. Aujourd’hui on voit une montée en puissance de l’armée chinoise. L’Armée Populaire de Libération s’entraine sur des copies de cibles réelles à Taïwan. De plus, des missiles entreposés sur les cotes sont pointés vers Taïwan.
Il y a deux cas dans lesquels le gouvernement chinois pourrait mener une guerre : Soit elle est sûre de gagner mais Taïwan est tout de même puissant avec des missiles cachés. Ou alors beaucoup plus inquiétant, la Chine serait contrainte par son égo national. L’horizon de la guerre semble de plus en plus présent ! La Chine prépare son armée au cas où la situation change. Le Parti Communiste Chinois ne se rend pas compte que la situation, qui leur est favorable, pourrait être stoppée.
Les événements de Tian’anmen sont selon la Chine une « invention occidentale »
En Chine il y a eu un « lavage de cerveau radical » pour faire oublier ce cauchemar. Cependant, aujourd’hui il y a de plus en plus d'attentats, une frange de la population conteste la souveraineté du Parti. Ce qui a fait fonctionner le régime sur le long terme, depuis plus de 70 ans, est qu’on a lobotomisé le peuple. Les autorités ont réussi à faire penser que si l’on critique le PCC c’est qu’on est un anti-chinois. Avec le lavage de corruption au sein du parti, personne n’ose se rebeller. Xi Jinping se serre de la corruption pour asseoir son pouvoir. Sur 90 millions de membres du PCC, 5 millions ont été punis.
La diplomatie des « loups combattants »
La diplomatie des « loups combattants » est une politique qui donne comme consigne aux ambassadeurs d’attaquer les pays dans lesquels ils sont. En France, le dernier événement en date est l’invective envers Antoine Bondaz. Cette diplomatie s’est brutalement illustrée, vendredi 19 mars, avec un tweet de l’ambassade de Chine à Paris qualifiant de « petite frappe » Antoine Bondaz, un membre de la Fondation pour la recherche stratégique (FRS). C’est la première fois que la représentation chinoise agresse nommément un chercheur français. La Chine a franchi la ligne rouge. A ce titre, Stéphane Corcuff a dit :
« Cette période me fait penser à la période d’émergence du régime nazi »
Les Routes de la Soie sont un instrument de domination et de prédation
En Afrique, la Chine pille les ressources naturelles. Des pays se sont lancés à corps perdus pour ensuite découvrir le piège de la dette. La dette est un danger qui pend au nez de la Chine. La Chine est en train de constituer des concessions étrangères. Avec le COVID-19, la Chine a brulé en 3 mois 30 ans d’efforts pour soigner son image. Il y a deux possibilités : soit le PCC ne connait pas son image en Occident, soit il s’en lave les mains car il a confiance en lui. Avec ce qui s’est passé à Hong-Kong, la population taïwanaise ne veut plus entendre parler de réunification. Autre problème, avec le vieillissement de la population, les coûts sont monstrueux pour assurer le paiement des retraites.
Retrouvez l'intégralité du débat en replay vidéo ci-dessus
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Edouard CABOT
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